A partir de 9 ans • Journée pique-nique pour la petite Jo et sa famille. Mais Jo ne trouve pas sa place, surtout depuis que sa maman a divorcé. Elle décide de partir à l’aventure dans la forêt voisine, avec son petit sac à dos et quelques provisions. Elle tombe alors sur d’étranges et tout petits personnages, grimés tels un mini roi et une mini reine, sur de tout petits chevaux multicolores. Même s’ils ne semblent vraiment pas ravis de cette rencontre, elle décide de les suivre. Quelle n’est pas sa surprise quand elle découvre tout un village de petits êtres tous plus surprenants les uns que les autres. Elle y fait la connaissance de Nouk, une petite créature-chat qui vit seule dans une cabane perchée dans un arbre depuis que sa maman a été enlevée par un mystérieux matou colérique et autoritaire.
Manifestement, à l’arrivée de Jo, un événement important approche. Tout le village s’affaire à préparer une intervention contre celui qu’ils appellent l’Empereur, afin de récupérer leurs camarades enfermés dans son grand château. L’Empereur retient également contre leur gré bon nombre de Vermeilles, ces adorables petits poneys colorés. Il les collectionne!
Sans réfléchir, Jo se glisse avec Nouk dans le convoi qui part tenter d’infiltrer le château en plein bal costumé. Bien vite, l’équipe se réduit et la suite de l’épopée se fera accompagnée d’un petit bichon blanc à 6 pattes bottées arc-en-ciel et d’un énorme renard un peu bourru déguisé en cupcake.
Entre Myazaki et Alice au pays des Merveilles
Dès le début, on retrouve cette ambiance à la fois étrange et chimérique d’Alice au pays des Merveilles: une petite fille s’éloigne de son ennuyeux quotidien et plonge dans un monde merveilleux, peuplé de créatures étranges, à la fois enfants, animaux, créatures magiques ou bien un mix de tout cela. Comme Alice, Jo rencontre les différents habitants de ce petit monde au fil de son itinéraire.
Les dialogues sont parfois curieux, décousus ou même absurdes. Les références à l’enfance et sa culture sont très nombreuses (Peter Pan, le chat botté, la vermeille qui ressemble à Rainbow Dash de My Little Pony etc…) et on lit avec bonheur les répliques rigolotes, comme quand le cyclope enfile un masque de crocodile et se plaint de ne pas avoir « l’œil en face des trous », ou que Nouk explique à Jo que Véro, une des villageoises, aimerait « épouser Maurice sur la bouche ». L’auteure distille des mots d’enfants, des blagues et des dialogues qu’on croirait sortis tout droit d’une discussion de cour de récré, des répliques surprenantes, tant par leur naïveté que par leur poésie. D’ailleurs, le titre « les Vermeilles » est clairement une version écorchée par une enfant du mot « merveilles », encore en référence à Alice.
En plus d’Alice et Myazaki, on reconnaît des comptines et des chansons, des clins d’œil à de nombreux autres classiques de la jeunesse. Le « marais de l’oubli » rappelle énormément les « marais de la mélancolie » de l’Histoire sans fin (The Neverending story) et le périple initiatique de Jo, avec ses nombreuses épreuves, ressemble beaucoup à celui d’Atreyu.
Jo retrouvera tout naturellement l’envie de retourner vers les siens quand cette petite fugue enchantée lui permettra de comprendre ce dont elle a besoin.
Mine de rien, sur les 160 pages de cette jolie BD – ou de ce roman graphique -, on aborde beaucoup de sujets plus ou moins délicats, qui parlent aux enfants: la famille, le divorce, l’autonomie, voire l’émancipation, l’amitié, la découverte du monde, le courage, la loyauté. La nature est également omniprésente avec les jolies cases muettes qui invitent à la contemplation des paysages imaginés par l’illustratrice.
D’un point de vue graphique, une douce inspiration nippone invite au voyage. La petite Jo a quelque chose de Myazaki, particulièrement dans les traits de visage, et les couleurs douces et acidulées, délavées comme des aquarelles donnent un côté irréel aux décors. La variété des cases de cette BD lui donne un bon rythme.
Ce titre a gagné le prix de la Pétite dans la catégorie BD au salon du livre de Montreuil.
Qui a testé?
Moi à 43 ans. J’ai adoré les parties les plus surréalistes et les bouffés délirantes totalement déhinibés. Ca m’a rappelé Alice aux pays des merveilles, cher à mon cœur.